MORE MAJORUM
Était-ce un mal, était-ce un bien
De voir mourir ses traditions ?
Était-ce un mal, était-ce un bien
Parions ?
Les vieux clochers de nos villages
Sont orphelins de leurs sonneurs
Le silence tourne la page
D’un temps qui n’est plus le leur.
Plus d’Angélus dans nos campagnes
Et l’Angélus dort au musée
Millet sans ses pinceaux regagne
Bien tristement son atelier.
Les campaniles désertés
Restent muets dans les montagnes
Et leurs toits ne sont habités
Que par des hiboux de cocagne.
Était-ce un mal, était-ce un bien
De voir mourir ses traditions ?
Était-ce un mal, était-ce un bien
Parions ?
On abandonne son Passé
Comme un sac de linge sale
Les souvenirs sont délaissés
Leurs couleurs jugées bien trop pales.
Il faut du neuf, du rutilant,
Du clinquant et du temporaire
On court, on court après le Temps
Et c’est le Temps qui nous enterre.
Au diable les douces veillées
Qui faisaient rêver les enfants
Et les tenaient tant éveillés
Aux lèvres des grands-parents.
Les vieux, parqués dans les hospices,
Maillent entre eux leurs souvenirs
Les temps nouveaux sont peu propices
À les voir lentement mourir.
Était-ce un mal, était-ce un bien
De voir mourir ses traditions ?
Était-ce un mal, était-ce un bien
Parions ?
On n’enseigne plus l’Histoire
Pour créer des hommes hors sol
D’où venons-nous ? Faut-il donc croire
Que cette question est d’un fol ?
La grande épopée de la France
Et ses racines en nos Rois
Sont parties en longue errance
Comme nos saints et notre foi.
Il nous faut des êtres nouveaux,
Tous identiques, tous bêlant,
Plus de France, plus de héros
Mais du commerce, des commerçants.
L ‘anonymat dans ce tourment
D’un monde nouveau qui consomme
Se complait fort dans ce néant
En oubliant ce qu’est un homme.
Où sont les saintes traditions
Des paysans au geste épique
Dressant leurs fourches avec passion
Et repoussant avec leurs piques
Ceux qui envahissaient leurs terres,
Portaient atteinte à leur foi,
Aux coutumes de leurs pères
Et à la personne du Roi ?
Ce sol riche de millénaires,
Pétri de sang et de sueur
Ils l’aimaient, la tête fière,
Et là était tout leur honneur.
Ce sol portait le nom de France
Qu’ils ne savaient même pas écrire
Mais leur cœur, ce doux nom de France
Depuis toujours savait le lire.
Était-ce un mal, était-ce un bien
De voir mourir ses traditions ?
Était-ce un mal, était-ce un bien
Parions?
Vieux grognards du premier Empire,
Jeunes Poilus dans les tranchées,
Vous qui avez connu le pire,
Tant de sacrifices cachés,
Tant de sang et tant de souffrances
Silencieusement endurées
Pour que l’éternelle France
Vive, vous vous l’étiez jurés,
Avons-nous le même courage,
Avons-nous seulement l’envie
D’écrire de nouvelles pages
Pour une France en sursis ?
Auras-Tu la gorge tranchée
Comme l’Abbé, le Professeur
Accusés de tous les péchés
Par des assassins, des tueurs ?
Où relèveras-Tu la tête
En affirmant ta liberté,
En refusant que l’on s’entête
À vouloir tant t’Orienter ?
Nous habitons sur un volcan
Mais nous rions et nous rions,
Nos rues sont à feu et à sang
Mais nous dansons et nous dansons.
Dans cette folle sarabande
Qui grossit de jour en jour,
Quel capitaine est aux commandes,
Vers quel voyage sans retour ?
Était-ce un bien, était-ce un mal
De voir mourir ses traditions ?
Était-ce un mal, était-ce un bien,
Parions ?
À Marseille, le 4 octobre 2023
Jean Lary de Fortuné
PS : More Majorum, locution latine, devise de la Légion étrangère employée le 25 février 1940 par le lieutenant-colonel Magrin-Verneray, commandant la 13° Demi-brigade de marche de la Légion étrangère et adressée à ses soldats dans une magnifique harangue. Peut être traduite par « À la manière de nos Anciens »
Recueilli par Constantin LIANOS
Ancien Légionnaire-officier à titre étranger.
- Vues: 1094