Banalisation des armées
Rien n'est pire que la banalisation des armées : EXTRAITS d'audition du général d'armée François LECOINTRE.
La spécificité militaire
(…) Rien n’est pire que la banalisation. Le président de la République, les parlementaires et nos concitoyens commencent à mesurer l’importance de conserver une armée qui fonctionne selon un mode et un statut particulier, des valeurs singulières, lesquels en font une composante essentielle et particulière de la Nation. Cette spécificité militaire est indispensable à l’équilibre de notre culture collective et indispensable également à l’efficacité des armées. Vous connaissez bien cette citation du général de Gaulle : « La défense ! C’est là, en effet, la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même. » J’en suis moi-même persuadé. Je constate que cette citation est affichée dans cette salle…
(…) Pour citer à nouveau le général de Gaulle, « la France s’est faite à coups d’épées ».
Je suis persuadé qu’une grande démocratie comme la nôtre a besoin d’une armée forte, sûre de ses valeurs et sûre de sa singularité – une singularité qui ne la sépare pas du reste de la Nation mais qui la complète. Cet état militaire répond à la vocation de ceux qui veulent mettre leur vie au service de la protection de leurs concitoyens et de la défense des intérêts de leur pays, cela en usant de la force légitime y compris pour donner la mort sur ordre.
L’usage de la force, comme l’état particulier de ceux qui ont la lourde responsabilité de la mettre en œuvre, n’a rien d’anodin. Cela doit continuer à interroger tout un chacun. C’est bien en raison de cet état particulier et de tout ce qu’il implique, que les militaires acceptent les contraintes qui leur sont imposées : discipline, neutralité, disponibilité.
L’ensemble de ces contraintes et l’ensemble de ces règles garantissent l’efficacité des armées. C’est pourquoi nous devons rester très vigilants vis-à-vis de toute disposition qui conduirait à la banalisation de cet état militaire. De ce point de vue, et par exemple, la transposition de la directive européenne sur le temps de travail comporte un risque de remise en cause et je serai très attentif à ce que le principe de disponibilité attaché à l’état militaire ne soit pas affaibli.
Général d’armée François LECOINTRE
Chef d’état- major des Armées
(Extraits d’audition par la commission de la Défense nationale
le 4 octobre 2017)
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