HISTOIRE DE PANGOLINO, LE PANGOLIN CONTE POUR ENFANTS SUITE
HISTOIRE DE PANGOLINO, LE PANGOLIN CONTE POUR ENFANTS
Jean Lary de Fortuné
Le jeune Pangolino a décidé de quitter Wuhan et de venir vivre en Europe. Il a choisi la France et notre ville de Marseille. L’annonce de son départ attriste naturellement sa mère, la si charmante et si belle Pangolina.
Jean Brun, notre cher peintre aquarelliste de renom, a bien voulu nous représenter Pangolina. Sous l’évocation des yeux bleus admiratifs de son fils, elle tend son bras droit en signe d’au revoir et tient de sa main gauche un simple bouquet. Non pas de fleurs mais d’herbe. Tout simplement d’herbes, vertes, jeunes, fraîches, pour signifier que le plus beau cadeau qui puisse aujourd’hui être offert à un fils est la préservation de notre monde, le respect de cet écrin unique au sein duquel nous vivons et qui nous nourrit, comme enfant, nous a nourris le sein de notre mère. Notre Nature aussi est notre sein nourricier.
Pangolino arriva à Marseille par une belle journée d’été, choisit un hôtel confortable et, bagages déposés, entreprit une première découverte de la ville. Il était habillé à la mode pangoline, n’ayant de toutes façons pas d’autres vêtements à se mettre sur le dos que ceux de son pays natal. Quelle ne fut pas sa surprise ! Je suis regardé, pensait-il, comme si j’étais descendu du ciel ! Hommes, femmes, enfants, tous voulaient le voir. Lui, ne tenait pas spécialement à être vu, ni à voir les uns et les autres, encore moins une foule suivre chacun de ses pas, chacun de ses gestes, s’arrêtant avec lui chaque fois qu’il faisait halte devant une vitrine, une boutique, un monument, un square… Qu’est-ce donc que ce peuple, s’interrogeait-il ?
En moins d’une heure il était devenu l’attraction de toute une ville. Même Didier Raoult n’avait pas connu une telle célébrité en si peu de temps. Des enfants, plus coquins que les plus téméraires des adultes, se plaçaient juste sous son nez et l’un d’eux, plus effronté que les autres, lui demanda son nom. Les bonnes manières dont il avait été pétri durant toute son enfance lui avaient inculqué cette règle de base et de courtoisie qu’il convenait de répondre à toutes questions posées.
- « Cher enfant, dit-il, je me nomme Pangolino, Pangolino Pangolinesco ».
Cela ne fit qu’aggraver la situation. Comme une volée de moineaux, la voletaille des enfants se mit à chanter :
« Pangolino ! Pangolino Pangolinesco ! ».
Cela sonnait mieux qu’un slogan syndical ! Et la foule qui suivait de reprendre en chœur :
« Pangolino ! Pangolino Pangolinesco »
Intrigués par tant de cris et d’animation, les curieux, les passants, les promeneurs, badauds et oisifs grossissaient le flot du cortège suivant sieur Pangolino. Marseille n’avait vu pareille foule depuis la visite du Maréchal sur la Canebière et celle du Général ensuite. Les foules sont volages et varient comme plume au vent. Vous me pardonnerez car il me semble que quelqu’un a déjà écrit ou peut-être chanté un air de ce goût-la.
Alors que notre Pangolin suivi de sa troupe contre laquelle il ne pouvait rien passait devant la Banque de France, deux agents de police en fonction, sanglés dans leur ceinturon de cuir, entendant à moitié ou croyant entendre le nom d’ … « Unesco » crurent à une manifestation politique. Sur le champ voilà les deux sbires téléphonant à l’Évêché.
Immédiatement alerté, le haut chef de la confrérie policière décida d’envoyer sur les lieux un détachement de fonctionnaires. Il lui semblait prématuré de déclencher l’alerte auprès du GIPN, le fameux Groupe d’Intervention contre les Personnes Non identifiées. Le détachement était commandé par le brigadier-chef principal répondant au nom de Marius Ugolin.
Le brigadier-chef principal Marius Ugolin était natif du Panier. Il connaissait sa ville sur le bout des doigts. Des doigts qu’il avait courts et boudinés. L’homme avait de l’assurance, des moustaches noires, un teint pourpre et du savoir-faire. Avec son uniforme bleu délavé, cela faisait un cocktail inattendu mais fort sympathique. Ugolin s’approcha de sa « cible » préalablement encadrée par ses hommes d’escorte prêts à intervenir à la moindre injonction.
Ugolin se planta, torse bombé, moustaches dressées, jambes serrées, devant celui dont il avait mission de relever l’identité.
- « Monsieur, au nom de la République, je vous prie de bien vouloir me décliner votre nationalité, votre nom, votre âge, le lieu de votre résidence et le motif de votre présence ».
Les brigadiers chefs principaux de première classe exceptionnelle avaient, en ces temps-là, des lettres et, s’ils pouvaient vous massacrer un dangereux malfaiteur en deux temps, trois mouvements, ne massacraient jamais la langue française. Pangolino, étonné encore que plus rien ne fut plus vraiment de nature à l’étonner dans cette ville, répondit :
- « Monsieur, je suis Pangolin ».
Ugolin n’en crut pas ses oreilles.
- « Pardon » dit-il.
- « Je suis Pangolin, répéta Pangolino, de nationalité pangoline, fils de Triple « H » Pangolinesco ».
- Le pandore resta coi. Tout autour, la foule s’était tue. On le sait et le brigadier-chef principal de première classe exceptionnelle le savait aussi : les foules sont têtues.
- « C’est quoi coi ? » demandait un enfant en tirant la jupe de sa mère.
Ugolin, agissant en uniforme et conformément à l’ordre de ses chefs, sortit de sa poche son téléphone pochable et appela son chef, dont l’identité ne peut être ici dévoilée pour des motifs évidents de sécurité.
- « Amenez-le moi sur le champ »
Croyant être invité à partir dans la campagne provençale qu’il ne connaissait pas encore, Pangolino se fit une joie de suivre son Ugolin, considérant qu’il venait de se faire un premier ami marseillais et tout heureux d’être mis à l’abri d’une foule trop encombrante à son goût …
(À suivre, si Pandémie permet ...)
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