Compte rendu de la conférence sur le thème : La géopolitique de la criminalité organisée, une menace pour la France? donnée par José d'ARRIGO
Criminalité organisée : une menace pour la France ?
« Nous ne prétendons pas détenir la vérité. Nous voulons simplement apporter un nouvel éclairage, un autre son de cloche, à tout un pan de l’histoire du grand banditisme marseillais dont nous avons été les témoins directs ou indirects ».
Ces deux phrases tirées de l’avant-propos du livre « Zampa » de José d ‘Arrigo et Robert Grobert (Ed. La manufacture de livres. 2023) auraient également pu ouvrir la conférence de monsieur José d’Arrigo délivrée ce samedi 14 septembre devant les membres de l'Association de anciens combattants et amis de la Légion étrangère AACLE et de l’Association Nationale des Anciens Combattants de la Légion étrangère (ANACLE). Son président-fondateur, le lieutenant-colonel Constantin Lianos, avait, en effet, invité le journaliste et écrivain à intervenir à l’occasion de l’ouverture de la nouvelle saison des Associations et les réseaux de Monsieur Légionnaire. Heureux choix s’il en est !
Un lever de rideau époustouflant sur un thème on ne peut plus d’actualité.
« La criminalité organisée : une menace pour la France ? »
Qui ne connaît José d’Arrigo ? Il faudrait n’avoir jamais lu la Presse, n’avoir jamais écouté une émission de radio, allumé un écran de télévision ou n’être jamais entré dans une librairie ! L’ancien journaliste, grand reporter au Méridional, correspondant du « Figaro », du « Dauphiné » et de « France-Soir », professeur en sa discipline à l’Université d’Aix-en-Provence, conférencier recherché, auteur de livres aux titres ciselés en forme de boulets.
Le public, naturellement nombreux et impatient, n’est pas prêt d’oublier la prestation, qu’il soit non initié ou connaisseur comme les magistrats, policiers et juristes présents dans la salle de la rue Aviateur Lebrix. Les uns ouvraient les yeux d’étonnement ; les autres opinaient du menton.
Une plongée immédiate dans l’ambiance
À la question : la criminalité est-elle une menace pour la France ? La réponse jaillit avec la rapidité d’une munition sortant de son canon : OUI !
Sans appel possible. Le problème est récurent depuis 50 à 60 ans.
« Nous somme sur la voie de la mexicanisation »
« Nous sommes sur la voie de la mexicanisation » prédit le conférencier. Et de rappeler certains faits : sur 27 candidats mexicains aux élections présidentielles, 27 assassinés. Nous ne sommes pas encore à ce stade, mais la voie est ouverte. Et d’évoquer le « baiser de la mort » dans l’affaire Jacques Mariani, la vengeance des héritiers du clan de la Brise de Mer. La « matone » avait donné ce « baiser de la mort ». Richard et Christophe abattaient les assassins de leur père à l’aéroport de Bastia et Jacques Mariani déclarait à son procès :
« Il y a parfois un problème de discernement entre le bien et le mal mais parfois il peut y avoir un mal utile ».
L’homme condamné à 30 ans est hissé au rang de héros corse. Et le lettré José d’Arrigo de citer Colomba de Prosper Mérimée.
La corruption : l’arme fatale
Des souvenirs personnels et glaçants
Premier épisode
Dominique Venturi (pour ceux qui ne le connaitraient pas : un des grands parrains du milieu corse de Marseille et de la French Connection, né en 1923 au Panier) était le seul à entrer sans frapper dans le bureau de Gaston Defferre (ancienne appartenance au Réseau de résistance Brutus).
Un jour, le fils de Venturi est emprisonné. Tel père, tel fils, dit le proverbe. José d’Arrigo reçoit un appel téléphonique :
- « Je voudrais vous rencontrer »
Au bout du fil, vous l’avez deviné, Nick, le père qui ne saurait paternellement laisser son fils aimé dans une telle situation déshonorante. Ah ! L’amour d’un père.
- « Mon fils ne mérite pas d’être en prison. Je vais vous donner des informations véritables ».
Le rendez-vous est pris au 116 avenue du Prado, à la hauteur du boulevard Lord Duveen.
L’auditoire est suspendu aux lèvres du conférencier. Une rencontre entre le parrain de la pègre marseillaise et un journaliste. Celui que nous avons devant nous.
Il a osé, José ! Il a osé se rendre à l’invitation. C’est cela le vrai journaliste : un stylo au bout des doigts et autre chose en haut des deux jambes de son pantalon. Oser.
Ils sont tous deux devant une table. Le premier sort des PV d’audition … de la veille. Des PV d’audition que le juge n’avait pas encore eus en mains !
- « Monsieur d’Arrigo, faites un article »
- « Je vais faire un article … mais devant vous ».
Lecteur, imagine la scène. Imagine-la réellement. Quel moment et quel courage ! Quelle maitrise.
José d’Arrigo saisit son téléphone, appelle à Paris son rédacteur en chef :
- « Je t’envoie un article. Ne rien changer ! »
Il comprend. On se croirait dans une scène de film. Mais là, ce n’est pas du cinéma.
- « Nine (c’est le prénom de la femme de Nick), apporte le café à monsieur d’Arrigo qui a bien travaillé »
Nine apporte un plateau avec deux tasses et … une enveloppe sur le plateau. Elle est lourde et épaisse. José ne résiste pas à l’envie de la tâter.
- « Je n’ai pas besoin d’argent. Je fais mon métier ».
Et de repousser l’enveloppe craft à l’angle du plateau.
- « Si vous avez un jour besoin de quoi que ce soit, demandez Dominique Venturi ».
Fin du premier épisode.
Second épisode.
Autre appel téléphonique :
- « Je veux vous parler : 22 heures sur la Corniche. Je serai en moto, une Triumph ».
L’appelant est inconnu. Notre journaliste se rend au rendez-vous. L’homme retire le casque qui le masque et le dépose sur sa Triumph impressionnante.
- « On connaît votre salaire. Je le quintuple. Vous vous rendez chaque matin à l’Évêché à 10 heures. Vous nous avertissez des descentes de police dans les bars, les boîtes … Donnez-nous les numéros d’immatriculation des véhicules ».
Il fait nuit noire sur la Corniche. Le journaliste et l’homme à la moto sont seuls. Tous deux à l’écart. Seul témoin la puissante Triumph avec son casque posé en équilibre au dessus de l’engin. L’équilibre n’est pas que dans le casque. En face la Méditerranée qui roule ses vagues et a roulé, soit dit en passant, quelques cadavres à jamais muets …
- « Je vous respecte, mais je fais un autre métier que vous. Je ne peux accepter ».
- « Si vous voulez rester avec votre salaire de merde … »
Et les dockers
- « Tu connais sur la photo … c’est bien ta femme et là tes enfants ».
Le conteneur, tu le places à cet endroit, près de la porte du Port … ».
5000 euros pour le premier dépôt.
Que voulez-vous qu’il fasse ?
L’ancienne présidente de la Cour Régionale des Comptes, madame Danielle Lamarque, a déclaré :
- « Marseille et la Côte d’Azur sont gangrénées par la corruption ».
Huit informations établies et transmises par ses soins sont restées lettres mortes. La neuvième et dernière lettre qu’elle reçut fut celle qui la mutait à Bruxelles … avec une promotion !
Zampa, les frères campanella, l’affaire Baresi
Les récits se suivent et se ressemblent. À son arrivée, le nouveau commissaire de police recevait une Renault 21. Elle était prête à Salon. Comment ensuite poursuivre ? Bien plus, il veillait même au bon fonctionnement des bars, des boîtes et du reste … Tout roule ! Tout roule !
Cinq sur cinq. Pardon : 21 sur 21.
Mêmes complicités sur le Port. Mêmes complicités avec les gardiens de prisons devenus des complices officieux des truands. Qui a informé des conditions précises du transfert, le 14 mai 2024, de la « mouche », Mahomed Amra, délinquant multirécidiviste impliqué dans des enlèvements, séquestrations, tentatives d’assassinats, complicité de meurtres, de son transfert suivi de son évasion au péage d’Incarville avec la mort de deux agents pénitentiaires ?
La bataille est perdue
La déclaration est de Nicolas Bessone, procureur de la république à Marseille. L’entreprise la plus florissante est la drogue. Rapport : 60 000 euros/jour. Les acteurs de ce commerce florissant et stupéfiant disposent de luxueuses propriétés en Afrique du Nord et ailleurs, au Qatar … Si le budget de la Justice se situe à 10,1 milliards d’euros, le montant des recettes de la drogue atteint aujourd’hui 6,5 milliards et bientôt dépassera le premier. Comment donc s’en sortir ?
219 millions de consommateurs dans le monde. 23 tonnes saisies en 2023. Un montant ridicule. Comme le résultat des « Opérations Place Nette ». 58 kg saisis : dérisoire !
Un combat à mener
Devant ce véritable « problème de société » il conviendrait de mener un « véritable combat ». Mais on a déshabillé la douane. Des milliers de containeurs passent sans contrôle. La situation est encore pire en Hollande. Il faudrait créer un Parquet anti trafiquants devant cette industrie de masse qu’est devenu le cannabis.
« La France est entourée de Narco-États » déclare un député clairvoyant. Les moyens de lutte manquent. Instaurer un statut de « repenti » comme en Italie ? Mais la corruption touche même les élus. Auparavant la criminalité se cachait ; aujourd’hui, c’est de l’histoire ancienne.
Des criminalités multi-visages
À la toxicomanie et autres criminalités s’ajoutent les atteintes numériques. Encaisser des fonds par vols et ruses. 278 000 atteintes numériques ont été recensées. 55% des entreprises en sont victimes. Ajoutons l’escroquerie sentimentale qui pirate les fonds de personnes fragiles avec des bases situées au Sénégal et au Mali. Sans oublier le recyclage d’argent sale, la cyber-menace, le cyber terrorisme …
Le monde du Football
Faut-il aussi parler du monde du football ? Des transferts juteux rapportant 10% à chaque transaction sur des trentaines de millions. Tous les clubs français ont été rachetés sauf 4 sur 18 de la Ligue I. Pourquoi ? Le magistrat Étienne Ceccaldi n’aurait-il pas déclaré :
- « Le club de l’OM est sous l’emprise de la Mafia » ?
En conclusion
Chers amis, que dire de plus ? Que nous sommes au dessous de la vérité ? C’est ce que confirme le commissaire Claude Dupont en conclusion. Il souscrit entièrement au tableau dressé par notre journaliste écrivain. Clientélisme, copinage, corruption et mafia. Il évoque ainsi la Cosa Nostra sicilienne, un véritable empire disposant même d’une Cour de Justice. La corruption pèse sur la France et dévore l’ensemble de l’organisation sociale. Sur 6 à 7 milliards que génèrent les trafics on saisit 117 millions. À sourire si ce n’était dramatique.
Des constats et une conclusion aussi révélateurs qu’inquiétants. Pour ne pas dire effrayants.
Deux hommes : une même conclusion. Deux hommes remarquables.
Comment, à l’issue de ce compte rendu ne pas inviter chacun à lire les ouvrages de monsieur José d’Arrigo. Vous les trouverez dans toutes les bonnes librairies selon l’expression consacrée. À lire et à méditer.
Comme l’exprime notre conférencier, le journaliste doit faire de l’investigation, doit enquêter. Sa mission première est de dire la vérité. Le vrai journaliste est là pour faire éclater la vérité. Le vrai journaliste a un rôle social. Il lui appartient de dire le « non-dit ». Avoir le courage de dire le « non-dit ».
Le journaliste, digne de ce nom, n’est pas qu’un homme de plume. C’est un œil, un œil perçant, pointu, aigu, tranchant. Un observateur sans complaisance. Au delà de l’observation un penseur. José d’Arrigo est de cette trempe. Soyons intimement convaincus que nous avons vécu avec lui, grâce à lui, un grand moment de vérité. Et de courage.
Je pense à l’instant à quelques chansons qui portent en titre l’expression : « Tant qu’il y aura … » :
- « Tant qu’il y aura des étoiles » de Tino Rossi,
- « Tant qu’il y aura des oiseaux » de Dave,
- « Tant qu’il y aura des chansons » de Barbelivien,
- « Tant qu’il y aura des ombres » de Renaud.
J’ai envie de vous dire :
Tant qu’il y aura des journalistes comme José d’Arrigo, notre société et la France pourront garder Espoir.
Jean-Noël Beverini
Appel de nos morts depuis septembre 2023 :
Général Philippe GOUACHON, Adjudant Aurelio DEVIVI, ADC Noël TORTELLI, Col Michel GALTIER, M. Guy MARCHAD, Col Rolf FIGGE, Professeur Pierre SALIOU, Général Vittorio TRESTI, ADC Walter SCHLOTTIG, M. Marcel CHAPAPRIA, Lcl Pierre-François NEUVILLE, CES Jean-Pierre RICARD, Mlle Généviève de GALARD, ADC Yves GALVEZ, M. Jean BRUN, LCL Wolf ZINK, ADC René ZIEGLER, Adj Jean-Yves MORVAN, Général Pierre BARBAUD, M. Alain DELON, M Henri TACHOIRE.
4ème temps : le pot de l’amitié et échanges et on continue de chanter :
***
[14/09/2024 21:47:42] Armelle C.:
La conférence était passionnante, je n'imaginais pas une telle situation, j'ai 5 petits fils et je crains pour eux.. j'ai l'impression que tout est pourri.., J'attends avec impatience les prochaines élections, j'espère encore..
L'A.G est t elle ouverte aux sympathisants ?
Le 14 décembre j'aurai terminé mon dernier marché de Noël, s'en suivra une dernière vente en mars et les ventes à St Giniez seront terminées. Je continuerai cependant à animer les ateliers mais différemment.
Je vous souhaite à tous 2 une bonne soirée.
(Le Major, très gentil, à vraiment une très belle voix, il était intarissable!
Merci encore pour ce bon moment, je crois que cette nuit je repenserai à tout ce qui a été dit pendant la conférence.. Dans quel monde on vit!! Je regrette les années 70!!!
Amitiés. Bisous
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