A Dieu, cher René.
Les obsèques de René Pierini auront lieu le Jeudi 9 juillet 2020 à 15 H 00 Chapelle Saint-Pierre, 497 rue Saint-Pierre. Marseille.
(Au funérarium du 497 rue Saint-Pierre se situe en face de l’entrée du cimetière Saint-Pierre - à l’extérieur donc de l’emprise du cimetière).
René Pierini, à droite,
sur le site archéologique d’Entremont, la semaine dernière.
Mon téléphone ne sonnera plus chaque matin vers 9 heures pour t’entendre me demander de mes nouvelles et me donner des tiennes. C’était ainsi. Tu téléphonais à quelques amis : un rite matinal qui ponctuait l’ouverture de tes matinées. « Je veux savoir que mes amis vont bien ».
Le médecin de l’hôpital qui m’a appelé pour m’annoncer ton départ m’a dit :
-« Il connaissait votre numéro de téléphone par cœur et le répétait ».
Par cœur. Oui, pas dans la mémoire ; dans le cœur. Et ton cœur s’est arrêté. D’un coup, emportant dans son arrêt mon numéro de téléphone.
Mon ami, René, mon cher ami René, mon vieil ami, trois heures avant cet arrêt inattendu sur la route humaine d’une amitié si simple, si naturelle et si profonde, tu m’appelais. Et tu appelais aussi notre si chère amie commune Élisabeth. Une belle Trinité d’amitié.
René, tu vas manquer, évidemment, à tous ceux qui te connaissent, t’ont connu. Certains à qui j’ai téléphoné cet après-midi, des hommes solides, ont eu des larmes dans les yeux. Tu as été un homme « bon ». Un homme qui voulait aider, atténuer la souffrance des autres. « Il faut savoir aider » disais-tu souvent. Par exemple, tout dernièrement : « Il y a des enfants qui naissent aveugles, il faut … ». Ton regard, cher René, était de compassion face à la misère du monde.
Tu as profondément aimé ta ville, Marseille, où tu es né un 3 juin 1941. Ton immeuble fut bombardé. Ta famille s’était réfugiée dans la cave. Sous l’explosion, tu as été projeté hors les bras de ta mère! Il ne resta de l’appartement qu’un verre de cristal que tu conservais précieusement dans le meuble vitrine de ta salle à manger.
Petit marseillais, au sang corse, aimé de ses parents … Enfance, jeunesse, études, premier emploi de coursier dans une pharmacie… Guerre d’Algérie. Retour en 1962. Avec ton arme dont à bord du navire de rapatriement tu n’avais pas vidé le chargeur ! Cela nous faisait rire !
Dessinateur-projeteur en entreprise, tu entres ensuite à la Caisse Primaire de Sécurité Sociale puis à l’URSSAF. Mais dès tes 18 ans, une passion t’a saisi et ne te quittera plus : l’Histoire et l’archéologie. La numismatique aussi. Une passion qui va te donner une extraordinaire culture antique, grecque, romaine, médiévale …
Tu pouvais me réciter la vie des douze César. Quels sont les hommes si simples et d’une si haute culture ! À combien de chantiers de fouilles archéologiques participas-tu ? Ton nom figure dans les conclusions de fouilles archéologiques conduites par l’Institut National de Recherches Archéologiques préventives (INRAP) en Corse. Avec tant d’archéologues que tu me feras connaître et qui deviendront des amis. En fait, à y réfléchir, tu m’as ouvert cette « fenêtre » quand j’eus la chance de te rencontrer.
Tu étais élu au Comité du Vieux-Marseille. Évidemment en charge du Patrimoine. Que de « missions » de défense patrimoniale avons-nous conduites ensemble ! Durant tant d’années. J’avais ta confiance, j’avais ton amitié. Tu honorais mon amitié. Et moi, je m’appuyais sur toi pour nos combats patrimoniaux. Tu me donnais les arguments ; tu me donnais les photos nécessaires ; tu me donnais les contacts et la matière. Il ne me restait plus qu’à mettre en forme.
« Il faut assurer une veille patrimoniale, surtout l’été », disais-tu aussi. Comme notre si cher Adrien Blès.
Les fouilles grecques du Collège Vieux-Port furent notre premier combat commun. La disparition des gradins grecs du théâtre, un autre. La façade du Collège Pierre Puget qui devait être détruite, la Tour des Catalans, Arenc et son enclos funéraire grec, les vestiges du Lazaret … Et tant d’autres. L’oppidum de Saint-Marcel … Et évidemment La Corderie.
Tous les amis rencontrés sont là, ce soir, devant ma plume. Ils se reconnaissent et te saluent :
Les Amis de l’Huveaune avec nos conférences, le Souvenir Napoléonien, le Comité du Vieux Marseille, ton association de numismates, le musée d’Auriol, l’Association des Anciens Combattants de la Légion Étrangère (AACLE), et tant d’autres, associations et particuliers, et amis, l’Ordre de Malte… La magnifique commémoration du retour victorieux des Indes du Bailli de Suffren où tu déposas la gerbe au pied de la plaque apposée sur le mur du Musée de la marine de Toulon devant les Chevaliers de Malte en grand uniforme. Que de beaux et grands moments !
Faut-il oublier tous ces jeunes auxquels tu communiquais l’amour de l’archéologie et de l’Histoire, cachant, à l’occasion de « Journées Portes ouvertes » dans des bacs de sables des pièces antiques pour leur faire comprendre et les initier aux fouilles archéologiques !
Tu fondas l’Association « Marseille-Patrimoine et Mémoire ». René, tu as été un Grand. Par ta culture, par ta passion, par ta bonté, par ton amitié. Envers ceux que tu connaissais déjà et celles et ceux que j’ai pu te présenter.
La vie est ainsi. La vie s’achève toujours avant que la mission soit achevée. Tu avais encore tellement de fruits à donner. C’est ainsi. Nous nous sommes parlés une dernière fois, juste avant ton départ. Comme avec notre amie Élisabeth. C’est un « sacré » au revoir. La vie a de beaux signes.
Il y a une semaine nous étions ensemble sur le site d’Entremont avec l’archéologue ami Patrice Arcelin. Tes deniers pas ont été sur un site archéologique. Et quel site ! Et quel symbole ! La mémoire des sites archéologiques ne s’éteint pas, ne s’efface pas, ne disparaît pas. Cher René, nous gardons ta mémoire. Elle ne disparaît pas. Tous ceux qui t’ont connu, gardent ta mémoire.
Tu es un Grand, René. Tu es un homme. Tout simplement. Un Homme dans toute sa grandeur.
Ton ami, Jean-Noël Beverini
Membre de la commission culture de l'AACLE
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